Pauvre Colombine, victime d’un signe venant de nulle part, qui lui fait croire que là ; debout devant elle, c’est son Pierrot dans son costume d’Arlequin qui lui tend les mains ! Il paraît moins beau, moins fringant qu’à l’ordinaire ; son sourire est moins rieur, ses yeux outrageusement maquillés par des larmes ne sont plus couleur noisette. De sa bouche close il ne sort aucun son. Hier encore tous deux jouaient dans le foin à chercher la fleur blanche que l’on effeuille en trichant souvent pour ne pas déplaire à l’autre
Pauvre colombine, comment pouvait-elle imaginer que le jeu de la séduction est parfois bien cruel ! Elle et son Pierrot étaient faits tous les deux pour vivre dans la beauté des choses, hélas des mauvais esprits les faisaient vivre pour la beauté des choses ! Outrage fait à l’innocence et la naïveté des amants ? Ou abus de pouvoir de la volonté divine qui trace le chemin qui conduit à leur perte !
Il est très rare que le rêve change notre destin s’il demeure ancré dans cette petite boîte qui sert d’abri à notre cerveau ! Le rêve a besoin de grandir, d’occuper l’espace, il en a les moyens car il peut donner des ailes aux poissons, transformer une grenouille verte en monstre des profondeurs ! De faire émerger du tumulte des tempêtes les fantômes des naufragés égarés par des formes à moitié femmes, à moitié hommes . Ainsi va la vie, celle qui nous conduit au néant quand on s’obstine sur le sentier de la déshérence à la recherche de trésors éphémères ou d’âmes mortes abandonnées sur le bord du fossé parce qu’elles ne servent plus à rien !